Dans
cette étreinte passionnée nous ne formions plus qu’un seul et même être, nous
l’avions découvert, le vrai, l’unique, l’irremplaçable. Deux
jours durant nous sommes resté cloîtrés dans cette chambre, nous abreuvant du
sang de nos coeurs et nous nourrissant à la source de nos corps. Nous avons
quitté l’hôtel emplis l’un de l’autre, meurtris d’avoir trop embrassé, épuisés
mais tellement heureux. Plus
rien ne viendrait jamais remplacé le souvenir de ce merveilleux week-end. Contraint
malgré tout de faire mon devoir c’est le cœur bien lourd que je laissais
derrière moi la fée qui venait d’enchanter mon jardin d’Eden. A
l’époque où je vous parle, j’étais conducteur de blindé ; je pilotais un
CharAmx30. Nous étions basés à Kaiserslautern. Nous avions à parcourir une
distance d’environ quatre cents kilomètres pour arriver à notre « champ de
manœuvres ». Ces déplacements étaient impressionnants, vingt-cinq chars,
reliés par radio, en file indienne sur l’autoroute, armés jusqu’au dents d’obus
et de mitrailleuses. Nous avions ordre de respecter une distance maximum entre
deux chars pour éviter à un véhicule civil de s’intercaler dans le rang afin
éviter tout accident en cas de ralentissement et d’arrêt soudain. Piloter un
tel monstre demandait une vigilance constante et une dextérité qui ne venait qu’avec
l’expérience de la conduite. Je
n’étais pas devenu pilote de char par pure vocation, je n’ai pas fait le choix
d’être militaire, ce choix s’est imposé à moi, ou plutôt disons qu’il m’a été
imposé cela sera plus juste comme on le verra un peu plus tard. De
jour en jour la séparation devenait de plus en plus douloureuse, l’éloignement
ne me permettait pas de rejoindre Marie Luise même lorsque je n’étais pas en
manœuvres. Pendant
ces moments d’inaction je restais allongé des heures durant repassant dans ma
tête les moments les plus intimes de ces deux derniers jours ensemble. Loin
d’elle je n’existais plus. Les barreaux de nos lits me semblaient les barreaux
d’une cellule, j’étais le prisonnier attendant sa libération. La
nuit revenue, la solitude me pesait davantage encore, le temps n’en finissait.
Le sommeil me fuyait, je ne pouvais cesser de penser à celle que j’avais
laissée derrière moi. Perché sur mon lit je laissais sans honte mes larmes
couler. |
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